1938. Les conditions de vie des frères installés à Benchicao ne leur étant pas favorables, ils cherchent un autre lieu et achètent le domaine de Tibhirine. Ils transforment l’ancienne ferme coloniale du XIXe siècle (1860) en Monastère et développent les 374 hectares de terres agricoles.
L’ancienne écurie est transformée en chapelle. Ils construisent notamment un dortoir, un cloître et plus tard, une hôtellerie. Ils sont 20 moines en 1939. Certains seront mobilisés pendant la seconde guerre mondiale. En 1947, un dispensaire ouvre ses portes, le monastère ayant accueilli un an plus tôt un moine médecin, le frère Luc.
En 1950 le monastère compte une trentaine de moines. Un nouveau bâtiment voit alors le jour, devenant l’église du monastère, début d’un projet d’agrandissement qui sera abandonné à l’indépendance.
Durant la guerre de libération, deux frères (dont Frère Luc) sont enlevés puis relâchés. L’indépendance redessine le visage de l’Église d’Algérie qui perd la quasi-totalité de ses membres y compris une bonne partie des moines qui rentrent en France. En 1962 ils ne sont plus que 4 à Tibhirine.
En 1963, l’abbé général de l’Ordre Cistercien signe le décret de fermeture du Monastère contre l’avis du cardinal Duval, évêque d’Alger. Son décès suspend la concrétisation de cette mesure. Le Cardinal Duval, persuadé de l’importance du monastère pour l’Eglise d’Algérie, convainc les responsables de l’Ordre de maintenir une communauté sur place. Elle accueille de nouveaux membres venus de différents monastères en France, dont frère Jean-Pierre en 1964.
Peu après l’indépendance, les frères dont frère Amédée fondent l’école du village. L’arrivée du frère Christian de Chergé en 1971 amorce un tournant progressif dans les relations avec les Musulmans.
1979. Le frère Christian et le Père Claude Rault créent avec d’autres le Ribat es-salam, le lien de la paix, rencontre islamo-chrétienne fondée sur la prière et le partage d’expériences spirituelles personnelles. Ces rencontres, qui existent encore aujourd’hui, auront lieu dans l’hôtellerie du monastère jusqu’en 1996.
1984. Frère Christian est élu prieur. Son envergure spirituelle, sa connaissance de l’arabe et de la culture musulmane conduiront la communauté à son mûrissement. Les moines deviennent de plus en plus des priants parmi d’autres priants, dans un vivre-ensemble avec les habitants du village. La communauté, jusque-là disparate, va peu à peu s’unifier et se stabiliser.
1988. En réponse à l’évêque de Rabat, et malgré leur petit nombre, les frères fondent une annexe à Fès au Maroc. Frère Bruno en est responsable. A sa mort en 1996 c’est le frère Jean-Pierre qui prend sa suite.
Années 90. La décennie noire frappe l’ensemble du peuple Algérien. Directement menacés par le terrorisme, les moines choisissent de rester fidèles à leur appel et à l’amour de leurs amis.
1993. Le 30 octobre, le GIA menace de mort tous les étrangers qui n’auraient pas quitté le territoire avant le 1er décembre. Le 14 décembre, 12 ouvriers croates chrétiens, amis des moines, sont assassinés à Tamesguida. Le 24 décembre, nuit de Noël, le chef du GIA local, Sayah Attiyah, pénètre au Monastère. Il n’y a pas de violence mais cela marque un tournant dans la vie des moines.
1996. La nuit du 26 au 27 mars, 7 moines sur les 9 présents au Monastère sont enlevés. Frères Amédée et Jean-Pierre échappent à l’enlèvement. Le 26 avril, le GIA revendique l’enlèvement. Le 21 mai, le GIA annonce l’assassinat des moines. Leurs têtes sont retrouvées à l’entrée de Médéa quelques jours plus tard. Le 2 juin, leurs funérailles sont célébrées à Alger. L’enterrement a lieu le 4 juin à Tibhirine en présence des habitants du village.